Ou l'histoire d'une femme d'un génie... De génie!
On peut bien dire ça de notre héroïne n°1, madame Adèle Gödel, vu le mari qu'elle a supporté. :)
Université de Princeton, 1980. Anna Roth, jeune documentaliste sans ambition, se voit confier la tâche de récupérer les archives de Kurt Gödel, le plus fascinant et hermétique mathématicien du XXe siècle. Sa mission consiste à apprivoiser la veuve du grand homme, une mégère notoire qui semble exercer une vengeance tardive contre l’establishment en refusant de céder les documents d’une incommensurable valeur scientifique. Dès la première rencontre, Adèle voit clair dans le jeu d’Anna. Contre toute attente, elle ne la rejette pas mais impose ses règles. La vieille femme sait qu’elle va bientôt mourir, et il lui reste une histoire à raconter, une histoire que personne n’a jamais voulu entendre. De la Vienne flamboyante des années 1930 au Princeton de l’après-guerre ; de l’Anschluss au maccarthysme ; de la fin de l’idéal positiviste à l’avènement de l’arme nucléaire, Anna découvre l’épopée d’un génie qui ne savait pas vivre et d’une femme qui ne savait qu’aimer.
Albert Einstein aimait à dire : « Je ne vais à mon bureau que pour avoir le privilège de rentrer à pied avec Kurt Gödel. » Cet homme, peu connu des profanes, a eu une vie de légende : à la fois dieu vivant de l’Olympe que représentait Princeton après la guerre et mortel affligé par les pires désordres de la folie.
Yannick Grannec a réussi, dans ce premier roman, le tour de force de tisser une grande fresque sur le XXe siècle, une ode au génie humain et un roman profond sur la fonction de l’amour et la finalité de l’existence.
Albert Einstein - Kurt Gödel
Que dire... Deux histoires enchâssées l'une dans l'autre, le passé et le présent s'entremêlant autour d'une "cause commune", l'héritage de Kurt Gödel, le mathématicien de génie, la recherche immuable de l'amour et de la reconnaissance de deux femmes si différentes et pourtant si semblables... Un roman qui transcende le temps.
Après lecture, je me suis dit... Adèle est une sainte! C'est vrai que son mari était un génie... Mais... Quelle tête à claque! Un vrai comportement d'enfant gâté, mal grandi et névrosé de surcroit! Elle a été vraiment courageuse, car dès le début ce n'était pas une relation qui partait sur de bonnes bases, entre la montée du nazisme, la Liebe Mama (mère aimée en allemand - "Une femme et sa belle-mère sont comme deux savants se disputant la primauté d'une découverte. Aucune avancée ne naît sans matrice, elle-même fruit d'une autre matrice. Nous étions les deux versants d'une même médaille : elle l'avait mis au monde ; je le verrais sans doute mourir.") et les dépressions chroniques de Kurt, c'était pas gagné! Adèle fait face à l'adversité et aux refus des milieux gravitant autour de son mari de l'intégrer totalement. C'est une femme forte et pourtant brisée, luttant contre les désillusions qui s'accumuleront tout le long de sa vie.
Eh oui! Une danseuse légère au milieu des génies! Recevant Albert Einstein et d'autres à sa table...Incroyable! C'est pourtant l'épopée de la vie d'Adèle Gödel, que celle-ci raconte à Anna, jeune femme solitaire, depuis son lit d'hôpital. Adèle a travers ses confidences s'attache à Anna et tente de la conseiller (surtout en amour) avec son expérience. La relation qui se crée entre ces deux femmes est savoureuse : entre provocation et complicité, ces deux là deviennent inséparables. Leur relation ressemble à celle entre une grand-mère et sa petite-fille et en même temps à celle de deux femmes qui apprennent à vivre et à se comprendre d'égale à égale.
Le personnage le plus léger du roman reste Albert Einstein (si l'on peut dire, vu sa vie), son côté dépenaillé et son sens du désamorçage des conversations dangereuses apporte une bouffée de légèreté et fait très souvent naître un sourire lors de notre lecture. En effet, en dehors des vies des personnages, il reste l'Histoire. Cette Histoire sombre qui chassera les Gödel et bien d'autres de Vienne et d'Europe lors de la montée de nazisme, puis de la chasse aux sorcières aux États-Unis ensuite...
Mais, La Déesse des petites victoires, c’est bien elle, Adèle. Et ses « petites victoires » constituent le cœur de 50 ans d’abnégation aux côtés d’un mari prestigieux, Kurt Gödel, mathématicien de génie, complexe et attachant mais néanmoins pas bien facile à vivre au quotidien (Femme impatiente s'abstenir :) ). Victoires minuscules mais essentielles d’une femme pragmatique et décalée.
Bien que romancés dans cet ouvrage, les personnages d’Adèle et Kurt Gödel ont réellement existé. Gödel marqua moins les esprits que son contemporain, Albert Einstein dont il fût par ailleurs un ami très proche. Toutefois, Yannick Grannec est allée plus loin et à travers la naissance de liens inattendus entre une veuve acariâtre et une jeune femme désabusée; l’histoire gagne ainsi en profondeur et s’articule gracieusement entre passé et présent.
Réflexion sur le génie, la connaissance et la folie, il s'agit avant tout de la récit d' une histoire d'amour tourmentée.
"Je me levais parfois sans avoir la force d'affronter la journée. Ou même l'heure suivante. Et puis...un sourire sur son visage. Un rayon de soleil sur la nappe. Une occasion de mettre une nouvelle robe. Je réintégrais le monde. Chaque minute de souffrance s'effaçait par un espoir de joie. Comme un pointillé avec le néant... Oups! Me voilà à broder de la poésie !"
Un livre superbe ou poésie et mathématiques se réconcilient et finissent par faire bon ménage!
Commentaires
Par AnGee Ersatz*, le mardi 2 septembre 2014 à 10:48
Ton article m'a fait beaucoup rire, avec le personnage d'Adèle! Ce livre a l'air sympa, je vais me laisser tenter!
Par Salveena, le vendredi 5 septembre 2014 à 09:22
Tant mieux! J'ai passé un bon moment malgré les petites longueurs dues à mon ignorance mathématique. ^^ Tu me diras ce que tu en penses. ;)
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